Bye bye La Goméra
Vendredi 25 octobre, dernières heures aux Canaries, nous partons aujourd’hui vers le continent africain : Dakar, au Sénégal. Nous quittons là tous les bateaux rencontrés et nous sentons un peu seuls, en route vers des sentiers en friches…
Les enfants des équipages allemands et autrichiens nous aident à larguer les amarres vers 15:00. Mais, avant ce grand saut de 800 miles nautiques, nous devons faire le plein de gasoil à la station essence. J’hésite à laisser la barre à William pour les manœuvres car le vent souffle assez fort dans le port. Oui, mais il faut bien que je m’entraîne… Aller, c‘est parti ! L’appareillage se passe bien, puis je me dirige vers la station service. Là, le vent passe en latéral. Je vise le ponton, mais la force du vent me surprend, ma vitesse est trop faible et mon angle d’arrivée trop faible : je me retrouve collée au quai qui précède la station ! Quel stress… Je redonne les manettes à William, et, à l’aide de parbatages bien placés, nous nous décollons de ce quai. Plus de peur que de mal, mais décidément, je suis loin d’être au point sur les manœuvres de port…
Dix minutes plus tard, nous repartons avec le plein et laissons l‘île de La Gomera sur tribord. Dehors ça moutonne, il y a un bon vent, nous hissons les voiles, c’est parti…
Comme à chaque grand départ, petite appréhension avant le nouveau saut à franchir. Devant nous, environ 5 jours de mer, notre plus longue traversée jusqu’à présent. Mais surtout la météo s’annonce plus sportive que ce que nous avons connu jusqu’à présent : 25 à 30 nœuds de vent, se renforçant au niveau du Cap Blanc. Nous pensons ainsi avoir l’occasion de mieux tester l’équipement du bateau et l’équipage nous faire un bon entraînement avant la Transat.
La première nuit, le vent forci gentiment, nous partons souvent au surf, avec des pointes à 13-14 nœuds. L’étrave fend la mer, créant aux deux pointes des gerbes d’eau à la musique enivrante… Quelle sensation de vitesse ! Nous sommes fiers de notre bateau ! Mais rapidement la nuit tombe, les ténèbres deviennent roi, amplifiant le bruit des vagues et chaque grincement du bateau. Pas encore de lune, les vagues sont assez grosses. Un cachet de Touristil contre le mal de mer, un bol de riz, puis William et les enfants partent se coucher vers 21:00. Je me retrouve seule dans cette nuit d’encre. Là, nos petites pointes de vitesse ne m’amusent plus du tout… Mes angoisses ressurgissent à grands pas et je me demande pourquoi diable je me retrouve ici… Je dois me raisonner. Puis lentement, mes sens s’habituent à cet univers inquiétant, et la routine du quart s’installe : lecture, ordinateur, une oreille tendue sur les bruits du bateau et ses mouvements, petit tour d’horizon extérieur toutes les 15 minutes, contrôle des voiles, de la vitesse, et de la direction. Tout va bien, le vent est stable, pas de changement, Nous traçons notre route vers cette nouvelle terre. Je laisse William continuer le récit…
Traversée vers Dakar
Le lendemain, samedi, le vent est établi autour de 20-25 noeuds. Ca bouge dans le bateau, nous sommes au grand largue, à 145 degrés du vent réel. Il fait beau, nous ne sommes pas malades, mais cela bouge trop pour que les enfants travaillent le CNED. La nuit tombe, le vent monte légèrement, autour de 25-30 noeuds. Nous sommes sous 2 ris et 70% du solent. La vitesse est autour de 10 noeuds et les surfs montent jusqu’à… 17 noeuds ! La nuit se passe bien, mise à part une grosse frayeur avec un cargo que nous croisons, assez proche. Nous sommes en route de collision, je manoeuvre pour que nos routes divergent. La manoeuvre d’empannage prend un peu de temps car il y a du vent et pendant la manoeuvre, le cargo se déroute aussi ! Résultat : nous nous croisons à 300 m. C’est peu. La prochaine fois, nous l’appellerons par radio VHF avant de manoeuvrer.
Dimanche, le vent est autour de 25-30 noeuds. Notre nouveau record en surf: 19 noeuds. Ca déménage ! Mais le bateau se comporte bien. 235 milles parcourus depuis samedi soir. Et comment fête-t-on la fin du week-end ? Avec un petit thon qui mord à la ligne ! Dimanche soir, le vent fraichit et dépasse très souvent les 35 noeuds. Nous pensons prendre le 3ème ris et décidons finalement de passer la nuit avec le solent seul. Nous sommes à 6 ou 7 noeuds, les mouvements du bateau sont bien plus souples et nous passons une très bonne nuit.
Nous renvoyons la grand-voile le lundi matin, avec 3 ris au début, puis 2 ris. Le vent baisse à 20-25 noeuds. En fin d’après midi, la ligne nous réveille à nouveau et cette fois-ci nous remontons une belle dorade coryphène de 1m10 !
La journée de mardi est plus tranquille. Le vent diminue. Nous approchons des côtes sénégalaise. Les cargos commencent à se faire plus présents. Dans la nuit de mardi à mercredi, nous tirons des bords de grand largue en évitant les cargos. Nous longeons la cote d’assez proche à partir de 5h du matin et découvrons des pirogues de pêcheur non éclairées au ras de l’eau ! Nous arrivons au mouillage du cercle de voile de Dakar vers 8h avec le jour. Nous retrouvons avec plaisir Zen, et mouillons à côté d’eux. Nous sommes fatigués mais heureux d’être arrivés, heureux de découvrir un nouvel environnement.
This article was written by Isabelle